mardi 7 juillet 2015

Le Vide et le Plein


Pour de très bonnes raisons, je n'ai ni couru, ni écrit le week-end dernier, juste marché en compagnie de trois amis venus me rendre une belle visite à Marseille.

Hier matin, je me suis donné une séance de fartlek offensif lors de laquelle j'ai croisé une connaissance rencontrée à un atelier. Le salut furtif, la connivence de celui qui court et en croise un autre : tous deux respectent trop leur propre rythme pour déranger celui d'en face. On lève donc une main distante, sans agitation, sans rompre le cours des foulées.
Aujourd'hui, réveillé bien avant la sonnerie programmée, je suis allé tôt au bureau pour tenter de sauver la fin de semaine vouée à l'accueil de ma famille croisée avec la visite de Julie. Sorti tard, la frustration d'avoir donné mes mots à d'autres, sans avoir pu choisir ces derniers, plutôt que d'en disposer pour moi-même – une frustration récurrente dans mon travail –, a nourri celle de mon corps supportant mal l'immobilité contrainte.
Demain donc, malgré une autre journée longue, j'irai m'éveiller en courant.

Ainsi j'avance, à digérer ce qui peut faire tourner en rond.

*

Il y a une réelle frustration à ne pas courir ni écrire et d'avoir lié ces deux activités dans ce journal m'est encore difficile à analyser ou décrire.
L'esprit très occupé de Julie, d'importantes signatures dans les affaires de ma famille, de ma démission formalisée aujourd'hui même, des événements historiques que le peuple grec porte, je me contente pour l'instant d'observer que malgré tout, je n'abolis aucune organisation de la course ni de l'écriture. Ni l'une ni l'autre, bien qu'en second plan souvent – c'est nécessaire –, ne disparaît.

Comme je le crois je l'ai écrit en ouvrant ce journal, les deux me sont constitutives, essentielles de longue date. Mais leur lien décidé ouvre un jeu autre.
Des attentions inédites font leur apparition en courant, tenant à la nourriture de l'écriture mais aussi à sa digestion. L'écriture elle est plus opaque dans ses changements actuels.
Elle est, de manière générale, souvent plus opaque que quoi que ce soit, la déchirure de cette opacité et dans le même geste sa création pouvant d'un certain point de vue illustrer son mouvement, son énergie. Mais selon d'autres perspectives, son acte même, que l'on n'ose réduire, dont on n'ose suspendre la polysémie et l'orientation multiple, ou floue, ou variable, cet acte tangible se considère en des termes que je ne parviens à saisir présentement. Je tape sur mon clavier, reprend, retape encore, suis tenté d'effacer l'ensemble du paragraphe, ne le fais pas.
Je peine à articuler ce que je sais, ce que j'ai lu, avec ce que je tente de discerner, la nécessité d'un travail tenant l'epoché, tenant la déconstruction, un travail d'investigation technique pour lequel la fraîcheur des idées matinales serait plus indiqué. Et ainsi je me projette à nouveau demain matin, stigmatisant une fois de plus le crépuscule et la saturation du corps et de l'esprit qui l'accompagne, espérant pouvoir ensuite explorer d'une manière plus satisfaisante, mieux nourrie, la question dans une autre note de journal.

*

Je n'ai toujours pas acheté de nouvelles chaussures et l'usure des semelles commence à agacer mon genou. Il va falloir solder, avant la fin de la semaine.

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